Tuesday, January 12, 2010

Chagrin d'ecole (Daniel Pennac)



Voilà ce que j’appellerai (car un peu de grandiloquence, avouons-le, ne nuit pas…) un vibrant plaidoyer pour l’école de la République! L’amour du Professeur Pennacchioni pour ses (anciens) élèves transpire à chaque page, son énergie et son enthousiasme après plusieurs décennies dans le corps enseignant (si souvent malmené, si souvent décrié) n’en finissent pas de surprendre, et sa pédagogie de nous émerveiller un peu plus à chaque page. Quelle chance ils ont eue, ces élèves, d’avoir un tel maître à penser, de pouvoir se raccrocher à cette main tendue quand le sol fragile de leurs connaissances incertaines se derobait sous leurs pieds… J’ai retrouvé ici la plume fine et la pensée agile que j’aime tant chez Pennac, et le même humour léger assénant quelques vérités pas toujours bonnes à entendre sans avoir l’air d’y toucher. Daniel Pennac doit être un des rares ecrivains (devrais-je dire penseurs ?) contemporains à se souvenir que la mission première de l’école, ce n’est pas d’apprendre un métier, c’est d’apprendre à apprendre et d’apprendre à aimer apprendre. Evoquant tour à tour son enfance et sa propre expérience d’écolier rétif à tout forme d’apprentissage (“A l’époque, lire n’etait pas l’absurde prouesse d’aujourd’hui.”), et ses souvenirs de professeur dans des quartiers peu favorisés ([sur l’argot] “Rien qu’un petit lexique de connivence, histoire de se tenir chaud, de camoufler le désespoir.”), Pennac dresse ici un portrait subtil de l’échec scolaire et analyse les faiblesses de l’enseignement moderne – ou devrais-je dire la faillite systémique de l’éducation nationale ? L’impératif productiviste s’adapte mal aux exigences de l’esprit; 80% d’une classe d’âge au bac, et c’est Marianne qu’on assassine…